Les Pommes de senteurs de la Renaissance

Les Pommes de senteurs de la Renaissance

Histoire

Les pommes de senteur étaient des boules en forme de pomme dans lesquelles on disposait des senteurs odorantes telles que des parfums à l’état solide. Dès le Moyen Age les odeurs florales de la rose, du lys, de l’iris, de la violette étaient très prisées et à la Renaissance, de nouvelles essences s’enrichissent de matières animales ou végétales comme l’ambre gris, la civette, le musc, le camphre ou encore le santal.

Ces pommes de senteur était également appelées pomme d’ambre ou pomander. Au cours des siècles, les pommes de senteur devinrent de véritables bijoux en métal précieux comme l’or ou l’argent, utilisées pour supporter les mauvaises odeurs ambiantes. Contrairement à aujourd’hui, ces parfums n’étaient jamais posés directement sur la peau mais disposés dans des accessoires tenus sur ou à proximité du corps. Elles furent très utilisées à la cour des Valois, des Tudor et des Stuart.

Les premières pommes de senteur virent le jour au Moyen Age et furent en usage jusqu’au XVIIIe siècle.

La première mention de pomme d’ambre, ou pomander, désignait une pépite d’ambre gris enchâssée dans une boule de senteurs. On lui prêtait des vertus curatives mais aussi aphrodisiaques.

Le premier pomander est cité en 1174 dans un texte décrivant le présent offert à l’Empereur Frédéric Barberousse par le roi Baudouin de Jérusalem. Il le remerciait ainsi de son aide dans la lutte contre les infidèles.

À partir du XIVe siècle, le terme de « pomander » désignait l’objet où prenait place la boule odorante. Elle était constituée d’une petite cage sphérique s’ouvrant à l’équateur par une charnière et un ressort. Elle avait un usage essentiellement prophylactique, qui devait prévenir les maladies, ou thérapeutique. Elle fut très utilisée notamment pendant les épidémies de peste, les recettes du mélange de substances aromatiques étant adaptées en fonction du niveau de vie des utilisateurs.

Les pommes de senteur servaient également à parfumer le linge de corps qui n’était pas renouvelé régulièrement, même dans les milieux de la Cour. Les médecins soupçonnaient l’eau d’ouvrir les pores de la peau à l’air pestilent et, à la Renaissance, conseillaient de ne plus se laver mais de recourir aux vertus purifiantes et protectrices des plantes aromatiques et parfums. Il était conseillé de ne plus se baigner.

A la Renaissance, les pomanders devinrent des pièces d’orfèvrerie ciselées en or, en argent ou en vermeil. Au tournant du XVIe siècle, ils s’ornèrent d’incrustations de perles, émaux ou pierres précieuses, grenat, rubis, topaze, émeraude ou diamant. Parfois munis d’un pied, ils s’ouvraient en quartiers sur de petits réceptacles pouvant réunir plusieurs parfums sous forme de pâte ou de poudre.

Pomme de senteur en or émaillé à forme de grenade et ornée de rubis, émeraude et diamant. Vers 1600 - 1625. © Rijksmuseum - Amsterdam
Pomme de senteur en or émaillé à forme de grenade et ornée de rubis, émeraude et diamant. Vers 1600 – 1625. © Rijksmuseum – Amsterdam
Pomme de senteur en or émaillé à forme de grenade et ornée de rubis, émeraude et diamant. Vers 1600 - 1625. © Rijksmuseum - Amsterdam
Pomme de senteur en or émaillé à forme de grenade et ornée de rubis, émeraude et diamant. Vers 1600 – 1625. © Rijksmuseum – Amsterdam
Pomme de senteur en argent, Victoria & Albert Museum, d'Italie vers 1350
Pomme de senteur en argent, Victoria & Albert Museum, d’Italie vers 1350

Pomme de senteur en argent, Victoria & Albert Museum, d’Italie vers 1350

Pomme de senteur (pomander) à huit quartiers en vermeil et argent par Denis Mauny ou Antoine II Morelot, Dijon, vers 1680-1683
Pomme de senteur (pomander) à huit quartiers en vermeil et argent par Denis Mauny ou Antoine II Morelot, Dijon, vers 1680-1683 

A la fin du XVIIe siècle, on ne crut plus en leur supposés pouvoir magique de protection. On conserva les pommes de senteur pour être portées sous forme de bijoux et pour dégager des parfums attirants et séducteurs. Elles passèrent de mode au milieu de XVIIIe siècle.

Symbolique

Les pomanders adoptèrent des formes très variées : crânes, crucifix, escargots, pommes, œufs, noix ou fleurs, chacune ayant une signification symbolique et ésotérique particulière. Les monogrammes, inscription ou motifs allégoriques dont ils étaient ornés, étaient supposés renforcer leur pouvoir. Transmis de génération en génération, les pomanders étaient en effet bien plus que des objets à parfumer : on leur prêtait des vertus magiques protégeant des forces du mal et de la maladie. Les princes et les nobles en faisaient grand usage, comme les prêtres et les médecins qui comptaient sur leur présence pour se préserver de la contagion.

Usage

Les grands pomanders se portaient accrochés à la ceinture ou en pendentif autour du cou.

Les plus petits, parfois pas plus grands qu’un dé à coudre et reliés par une chaînette à une bague, se tenaient au creux de la main.

D’autres se fixaient en breloque à un bracelet, un collier ou servaient de bouton à une cape.

Version végétale

Une « pomme d’ambre » est aussi une orange plantée de clous de girofle. L’orange, ou autre agrume, piquée de clous de girofle et enrobée de poudre d’épices était la version végétale du bijou en métal précieux. On l’utilise toujours aujourd’hui pour parfumer et décorer la maison ou, placée dans les armoires, à protéger le linge contre les mites. Elles sont les reines des tables de Noël.

AUTRES EXEMPLES DE POMMES DE SENTEUR

Photo (C) RMN-Grand Palais (musée de la Renaissance, château d’Ecouen) Mathieu Rabeau

Portrait de femme au pomander – Pieter Jansz Pourbus (Holl.) – vers 1560
Portrait de femme au pomander – Pieter Jansz Pourbus (Holl.) – vers 1560

Tableau 1 : Bronzino (Agnolo di Cosimo di Mariano, 1503-1572) – Lucrezia de Medici (portrait présumé, 1560). Tableau 2 : Portrait de Jan Gerritz van Egmond, Jacob Cornelisz von Oostsanen, 1518. Tableau 3 : Portrait de femme au pomander – Pieter Jansz Pourbus (Holl.) – vers 1560.

Sources :

  • Musée de la Renaissance – Ecouen – Photo (C) RMN-Grand Palais (musée de la Renaissance, château d’Ecouen) / Mathieu Rabeau
  • La Grande histoire du Parfum, Elisabeth de Feydeau, Larousse, 2019
  • Parfums et aromates de l’Antiquités, Paul Faure, Fayard
  • Victoria & Albert Museum
  • Pinterest
  • Parfums de la Renaissance, Elza Dejean-Martin, 2019

Merci de votre lecture.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

RSS
LinkedIn
Share