Hautefort – Tel le phénix, il renaît de ses cendres
Le temps n’épargne rien n’y personne…Qui croirait en voyant ce majestueux château de Hautefort aujourd’hui, qu’il a connu au cours des siècles, de nombreuses vicissitudes et destructions ? Celles des guerres d’abord dès le Moyen Age puis celles de la fin de la Renaissance, où les seigneurs de Hautefort décident de le reconstruire au goût de l’ère Classique en vogue sous Louis XIII et plus encore sous Louis XVI, ne conservant que peu de traces du passé. Puis, la période révolutionnaire qui osa le transformer en prison et enfin, une longue période d’abandon après l’occupation de la famille de Damas qui sera suivie de ventes et de dépouillements.
Enfin, en 1929, le château fut acheté par le Baron et la Baronne de Bastard qui vouèrent leurs vies et leur fortune à ce beau géant qu’est Hautefort. Ce fut lors une entreprise titanesque pour restaurer, nettoyer, aménager et embellir Hautefort.
L’ensemble du château et d’une douzaine de propriétés d’une superficie d’environ 400 hectares fut acheté par la société du « Domaine de Hautefort », créée et financée par le père de la Baronne de Bastard, Monsieur David David-Weill (1871-1952), dirigeant de la banque d’affaires Lazard 2. En 1929, le château était en grand état de vétusté et inhabitable. Pendant dix ans, de 1929 à 1939, les travaux furent financés sans aide ni subvention. A l’époque, les travaux financés par Monsieur David-Weill atteignaient 30 millions de Francs. La Baronne de Bastard sollicita l’Etat en 1968 (avant l’incendie) et les travaux atteignirent 47 millions de Francs, l’Etat aidant à 45% de cette somme.
L’oeuvre d’une vie… seulement voilà, alors que le public était accueilli dans les jardins dès 1959 et que les restaurations du château étaient en grande partie terminées en 1965, un terrible incendie ravagea le château dans la nuit du 30 août 1968.
Coup du sort ? Accident ? Incendie criminel ? Que s’est-il vraiment passé ?
Et bien….aussi terrible que cela puisse paraître, c’est une horrible négligence de la part de jeunes gens, reçus au château, qui s’étaient retrouvés dans les charpentes et qui, fumant, ont laissé tomber un ou des mégots de cigarettes dans la sciure de bois présente sur les sols des charpentes suite aux travaux de restauration. Le feu a couvé de longues heures avant de se déclarer et d’embrasser très rapidement et totalement tout le corps de logis principal. Le bois fournissant une alimentation permanente, le brouillard intense cette nuit-là, le matériel des pompiers inadapté aboutirent à la destruction du grand corps de bâtiment, n’épargnant que les ailes.
Rien n’avait été prévu pour palier à une telle tragédie. Ce sont les pompiers d’Excideuil qui arrivèrent en premier mais leurs équipements n’étaient pas adaptés à l’époque pour attaquer cet océan de flammes. Puis ce sont tous les pompiers des environs qui rejoignirent leurs collègues, ceux de Périgueux, Lanouaille, Brive, Tulle, Terrasson, La Lardin ….Mais rien nit fit. Toute la nuit on entendit le crépitement du brasier, l’éclatement des ardoises et des boiseries, l’écoulement des planchers, le feu rongeant les murs, incisant les fenêtres à meneaux et ce sifflement des flammes qui dansaient dans ce ballet infernal et dévastateur. La Baronne de Bastard contemplait son oeuvre embrasée près du pont levis, ne laissant rien transparaître des émotions qui l’habitaient à ce funeste instant. Elle reste là jusqu’à 5 ou 6 heures du matin. A l’aube, il ne restait rien du grand vaisseau de ce magnifique géant…
Le montant des dégâts, hors mobilier et objets d’art étaient estimés à 7 500 000 francs. La Baronne se retourna vers la compagnie d’assurances des personnes concernées par cet incendie et demanda 8 500 000 francs de dommages et intérêts. Elle se lança corps et âme dans une seconde sauvegarde de l’édifice qui était sa raison de vivre. Elle s’entoura de personnes actives et attachées à château, elle remua ciel et terre pour aboutir à la reconstruction et restauration que nous pouvons admirer aujourd’hui. Voici une lettre qu’elle rédigea le 27 septembre 1968 au Directeur des Beaux-Arts de l’Etat.
Source des documents ci-dessus :
Recueil de Documents – Hautefort Notre Patrimoine – Tome 5 – Avril 2012.
Vous trouverez dans ce recueil un grand nombre de témoignages concernant l’incendie, ainsi que les démarches de la Baronne de Bastard pour reconstruire son château, les soutiens qu’elle reçut, des articles de presse de l’époque, les statuts du Comité d’aide à la restauration de 1968 et les éléments de la restauration de l’édifice.
LA FONDATION DU CHATEAU DE HAUTEFORT
Les documents reproduits dans ce recueil de documents proviennent en partie des Archives de la Fondation du Château de Hautefort créée en 1990 par la Baronne de Bastard dont la détermination fut inébranlable et constitue, pour nous toutes et tous, un exemple indéniable. Le chantier de restauration a nécessité plusieurs décennies sous la direction des architectes des Monuments historiques et a été rendu possible grâce au savoir-faire et au talent des Compagnons du Tour de France, des artisans et entreprises locales ou régionales qui ont œuvré pour sauver notre château.
Car oui, il s’agit bien de NOTRE château, que l’on soit habitants de Hautefort, voisins, voisines, guide ou ancienne guide comme je le suis, Hautefort est à jamais inscrit dans notre Vie, dans notre ADN.
Hautefort fait peut-être partie de vous, comme il fait partie de moi et je serai à jamais reconnaissante à Madame Durosoy pour son oeuvre. Je ne l’ai connu qu’au cours des 3 années où j’ai eu le privilège de travailler au château, mais ce furent 3 années qui ont marqué toute ma vie.
Alors si vous ne connaissez pas encore ce joyau du Périgord, je vous invite à le programmer dans votre Carnet de Vie.
Bien à vous.
Sources complémentaires :
- HNP – Recueil N° 5 – Avril 2012
- Périgord Magasine – Hautefort en feu – 1968
- Article Paris Match – 1968
- Article Sud-Ouest – 1968
- Article France-Bleue – 1968
- France-archives.fr
2 réflexions sur « Hautefort – Tel le phénix, il renaît de ses cendres »
Le récit de la renaissance de ce château, puis de son embrasement et enfin de sa reconstruction est émouvant car il fallait une grande volonté pour recommencer un tel chantier ! Un grand merci à Notre guide pour narration toute en passion intérieure, elle qui a pénétré dans les moindres recoins de ce joyau de notre patrimoine en Périgord.
Un grand merci 🙂